Fluides frigorigènes dans les pompes à chaleur résidentielles : qu’est-ce qui change ?

Les pompes à chaleur (PAC) sont essentielles pour améliorer l’efficacité énergétique du système de chauffage et pour réduire ses émissions de CO2. Des discussions étaient en cours au niveau européen pour renforcer le règlement F-Gaz, ce qui a un énorme impact sur les fluides frigorigènes utilisés dans les PAC et les climatiseurs. Cet article est consacré aux fluides frigorigènes utilisés des (petites) installations de chauffage résidentiel ainsi que sur l’impact de la législation modifiée sur l’installateur.

Gaz-F, CFC, HFC, PRP, qu’est-ce que c’est? 

Les fluorocarbures, également appelés ‘gaz fluorés’ ou ‘gaz F’, sont employés depuis de très nombreuses années dans le cycle de réfrigération des PAC. Ils sont souvent non toxiques, ininflammables et présentent les propriétés physiques adéquates pour une utilisation efficace dans un cycle thermodynamique, qu’il s’agisse de refroidissement ou de chauffage. Les plus connus de ces gaz sont les chlorofluorocarbures ou CFC. Ils sont cependant interdits depuis quelque temps déjà en raison de leur impact sur la couche d’ozone. Leurs successeurs, les hydrofluorocarbures ou HFC, n’affectent pas directement la couche d’ozone, mais sont malgré tout de puissants gaz à effet de serre. 

L’impact de ces substances sur le réchauffement climatique est exprimé par le potentiel de réchauffement planétaire ou PRP (ou PRG pour potentiel de réchauffement global, voire GWP pour Global Warming Potential). Il s’agit d’un indice que l’on obtient en comparant l’impact des gaz F à celui d’une molécule de CO2 (typiquement sur une période de 100 ans). Ainsi, le fluide frigorigène le plus répandu, à savoir le R410a, a un PRP de 2.088. Il s’avère donc plus de 2.000 fois plus nocif que le CO2. Par contre, le R32 a un PRP de 675, ce qui signifie qu’en cas de fuite, il contribuera moins au réchauffement de la planète que le R410a. 

Impact du règlement modifié 

Sous la pression du nouveau règlement F-Gaz l’industrie est tenue d’éliminer progressivement la production de fluides frigorigènes ayant un PRP élevé. On trouve dès lors sur le marché des fluides frigorigènes avec un PRP plus faible et des PAC qui en contiennent moins. 

Ainsi, depuis le 11/03/2024, à partir des dates mentionnées, les règles suivantes s'appliquent à la mise sur le marché des équipements de climatisation et des pompes à chaleur fixes : 

Pour les équipements de climatisation à brancher (climatiseurs) et les pompes à chaleur (y compris monobloc) : 

  • 01/01/2027, pour les appareils d'une capacité ≤ 50 kW, un PRP ne dépassant pas 150 ; 
  • 01/01/2030, pour les appareils d'une capacité > 50 kW, un PRP ne dépassant pas 150 ; 
  • 01/01/2032, pour les appareils d'une capacité ≤ 12 kW, une interdiction totale des gaz fluorés. 
  • Pour les équipements de climatisation (climatiseurs) et les pompes à chaleur bi-blocs (split) : 
  • 01/01/2025, pour les systèmes split contenant < 3 kg de réfrigérant (de l'annexe I - règlement UE 2024/573), un PRP ne dépassant pas 750 ; 
  • 01/01/2027, pour les systèmes bi-blocs (split) Air/Eau d'une capacité ≤ 12 kW, un PRP ne dépassant pas 150 ; 
  • 01/01/2029, pour les systèmes bi-blocs (split) Air/Air d'une puissance ≤ 12 kW, un PRP ne dépassant pas 150 ; 
  • 01/01/2035, pour les systèmes bi-blocs (split) d'une puissance ≤ 12 kW, une interdiction totale des gaz F ; 
  • 01/01/2029, pour les systèmes bi-blocs (split) d'une puissance > 12 kW, un PRP ne dépassant pas 750 ; 
  • 01/01/2033, pour les systèmes bi-blocs (split) d'une puissance > 12 kW, un PRP ne dépassant pas 150. 

Cela n’affecte pas seulement les nouvelles PAC, mais aussi sur la disponibilité et le prix des fluides frigorigènes eux-mêmes, puisque le seul moyen pour en obtenir consistera à les récupérer dans les appareils hors d’usage et de les régénérer. Par conséquent, la réparation d’une PAC fonctionnant avec ce type de produit sera beaucoup plus coûteuse. 

Ainsi, depuis le 11/03/2024, de nouvelles règles s'appliquent également, à partir des dates mentionnées, pour l'utilisation des gaz à effet de serre fluorés (gaz F) dans la maintenance et l'entretien :  

  • 01/01/2025, pour tous les équipements de réfrigération, quelle que soit la teneur en fluide frigorigène, un PRP ne dépassant pas 2.500 ; 
  • 01/01/2026, pour tous les équipements de climatisation (climatiseurs) et les pompes à chaleur, un PRP ne dépassant pas 2.500 ; 
  • 01/01/2032, pour tous les équipements de refroidissement (à l'exception des refroidisseurs), un PRP ne dépassant pas 750 ; 

Quelques exceptions supplémentaires, jusqu'aux dates indiquées, ont été incluses lorsque l'utilisation de gaz à effet de serre fluorés régénérés ou recyclés pendant la maintenance et l'entretien est autorisée : 

  • 01/01/2030, pour tous les équipements de réfrigération, quelle que soit la teneur en fluide frigorigène, dont le PRP est égal ou supérieur à 2.500 ; 
  • 01/01/2032, pour tous les équipements de climatisation (climatiseurs) et les pompes à chaleur, dont le PRP est égal ou supérieur à 2.500 ; 

cela signifie qu’à moyen terme, il faudra revenir à des fluides frigorigènes naturels tels que le propane (R290), le butane (R600), le CO2 (R744) ou l’ammoniac (R717). Ces substances ont un PRP très faible (entre 0 et 4), mais sont soit très inflammables (propane, butane), soit très toxiques (ammoniac) et/ou moins appropriées pour chauffer efficacement une habitation (CO2 et ammoniac). 

Les fluides frigorigènes et leurs limites 

Le propane (R290) est souvent choisi comme fluide frigorigène (avec le R32 comme solution intermédiaire) pour les PAC air-eau, lesquelles s’avèrent dès lors plus efficaces et permettent d’atteindre des températures de départ plus élevées, ce qui les rend également plus adaptées pour une application dans le cadre d’une rénovation. Malheureusement, l’utilisation du propane impose des règles de sécurité bien plus strictes. 

Le R410a est un HFC répondant à la classe de sécurité A1 : il est non toxique et ininflammable. Si l’on applique les critères de sécurité de la norme NBN EN 378-1 à une PAC split classique (c’est-à-dire une PAC composée d’une unité intérieure et d’une unité extérieure entre lesquelles circule le fluide frigorigène; voir figure 1) fonctionnant avec ce type de gaz, le local où se trouve l’unité intérieure n’est soumis à aucune règle. 

Le R32 est légèrement inflammable et relève quant à lui de la classe de sécurité A2L, ce qui entraîne des restrictions. La norme de produit NBN IEC 60335-2-40 supprime les règles les plus strictes, pour autant que moins de 1,84 kg de R32 soit utilisé. Par ailleurs, les restrictions définies par la norme NBN EN 378-1+A1 peuvent être assouplies si des mesures de sécurité supplémentaires sont appliquées (détection des fuites, par exemple). Il importe de suivre attentivement les instructions du fabricant lors de l’installation de la PAC. 

Le R290 (propane) est hautement inflammable et relève, par conséquent, de la classe de sécurité A3. La règle générale décrite dans la norme NBN EN 378-1 stipule que seuls 150 g de R290 sont autorisés dans un (petit) local. Bien que cette quantité soit suffisante pour une PAC moderne, elle ne l’est pas pour une PAC air-eau de 10 kW. 

Une nouvelle normalisation concernant l’utilisation des réfrigérants naturels est en préparation. La limite stricte de 150 g pourrait augmenter considérablement. En attendant, il est possible d’opter pour un système monobloc (c’est-à-dire une PAC regroupant l’ensemble du cycle thermodynamique et le fluide frigorigène en une seule unité; voir figure 1) installé à l’extérieur. 

Toutefois, des restrictions en matière de sécurité peuvent aussi s’appliquer à l’extérieur. Ainsi, il faut généralement éviter que des gaz inflammables plus lourds que l’air ne s’accumulent en un endroit et n’entraînent des risques d’explosion ou d’intoxication. Il convient dès lors d’éviter d’installer le système monobloc à proximité de structures enterrées ou d’une partie du jardin située en contrebas. 

En revanche, un système monobloc présente l’avantage de ne pas devoir être installé par un technicien frigoriste certifié, contrairement à un système split. Pour les interventions sur la partie frigorifique elle-même, il est néanmoins toujours conseillé de faire appel à un tel technicien. 

Enfin, des législations régionales en matière d’environnement imposent des exigences supplémentaires en ce qui concerne le contrôle annuel des systèmes contenant plus de 5 t CO2-eq de fluide frigorigène. Le tableau A indique que c’est souvent le cas des anciennes PAC fonctionnant au R410a, mais que la plupart des systèmes modernes ne sont pas concernés par cette mesure. 

Fig. 1 Représentation schématique d’un système monobloc (au-dessus) et d’un système split (en-dessous). 

Tableau A – Comparaison de l’applicabilité des différents fluides frigorigènes. 

Sur base de l’article Buildwise 2023-4.5